La version belge du site a été condamnée à cesser de diffuser les articles des principaux quotidiens, sous peine d’une astreinte d’un million d’euros par jour. Google annonce qu’il va faire appel.
S’exécuter… ou payer. Saisie par plusieurs quotidiens, la justice belge a sommé Google de retirer de son site Google News les articles de ces journaux. A défaut, le moteur de recherche devra payer une astreinte quotidienne d’un million d’euros.
« A ma connaissance, c’est la première fois que Google est condamné dans une affaire pareille », se félicite Margareth Boribon, secrétaire générale de l’association des Journaux francophones belges et trésorière la société de gestion de droits d’auteur Copiepresse, interrogée par lefigaro.fr.
La décision, rendue le 5 septembre dans la plus grande discrétion, prend effet dès aujourd’hui, lundi 18 septembre. En fin de journée, pourtant, Google affichait encore une partie des titres concernés, et n’avait pas encore publié sur sa page la décision de justice, comme le jugement l’y oblige. «Google a seulement eu connaissance vendredi de la décision du tribunal, soit près de 2 semaines après qu'une audience ait eu lieu», explique au figaro.fr Rachel Whetstone, directrice de la communication de Google pour l'Europe. Faux, répond Copiepresse. «Google ne s’est pas présenté au tribunal, mais nous l’avons informé du jugement trois jours après celui-ci, le 8 septembre dernier».
Quoi qu’il en soit, la firme de Moutain View a immédiatement annoncé qu’elle allait faire appel du jugement belge.
Vers un accord à l’amiable ?
Ce que la presse belge reproche au géant américain, c’est de diffuser une partie des articles directement à partir des outils disponibles sur leurs sites, sans demander l’autorisation préalable des journaux concernés, comme l’exige pourtant la loi. Du côté de Google, on assure travailler «dans le respect du droit». «Nous ne comprenons pas ce procès. Chez nous, la procédure est claire : Nous ne montrons jamais plus que les titres et les premières lignes des articles sur Google News. Si l’internaute veut lire la suite, nous le dirigeons vers le site du journal en question. Enfin, si un titre de presse ne souhaite pas être référencé sur Google News, il lui suffit de nous l’indiquer, et nous le retirons », assure Rachel Whetstone.
Pour Margareth Boribon, au contraire, «Google veut imposer sa logique : je me sers, et celui qui n’est pas content vient me demander de retirer ses contenus du site. Or, c’est contraire au droit européen». La représentante des médias belges estime qu’il n’y a « pas de raison qu’un producteur d’informations accepte qu’un diffuseur s’approprie son contenu ». Et de citer l’exemple de Yahoo !, qui « demande une autorisation préalable » avant d’utiliser le contenu d’un média.
« Notre objectif, précise encore la secrétaire générale, ce n’est absolument pas que nos contenus ne soient pas disponibles », mais que Google verse aux journaux dont il met à disposition les articles «une rémunération, comme n’importe quelle autre plateforme». «Vu les bénéfices que dégage ce groupe, son modèle économique ne devrait pas être mis en péril s’il partage les recettes publicitaires qu’il dégage avec nos contenus ».
Une éventualité qu’exclut le moteur de recherche. « Nous ne comptons pas rémunérer les journaux. Nous estimons que Google News leur offre suffisamment d’avantages en augmentant leur audience et donc leurs revenus publicitaires ». Et Rachel Whetstone d’évoquer « ces médias qui se sont retirés de Google News ». «Ils ont constaté la baisse de trafic vers leur site, et sont vite revenus chez nous », s’amuse-t-elle.
« Dans la société de l’information, le contenu n’est jamais rémunéré »
L’affaire belge de Google va-t-elle faire jurisprudence ? Depuis Oslo, où elle participe à la réunion des principaux éditeurs de presse européens, Margareth Boribon estime que la décision de la justice belge pourrait faire boule de neige. « Les autres éditeurs se sont montrés extrêmement intéressés », assure-t-elle. « Mon téléphone n’arrête pas de sonner, on ne devrait pas rester seuls très longtemps ». En France, une autre procédure du même type, lancée par l’Agence France Presse en mars 2005, est toujours en cours d’examen.
Mais au-delà, cette décision de justice pose une nouvelle fois la question du droit d’auteur sur Internet. « Aujourd’hui, estime Margareth Boribon, les gens acceptent de payer pour s’équiper en informatique ou en téléphonie, ou encore pour avoir un accès Internet, mais ils jugent que tout le contenu devrait être gratuit. Et ça, ce n’est pas possible ».
Info Le Figaro